Malgré des avancées réelles en matière d’égalité professionnelle ces dernières décennies, force est de constater que les inégalités de salaires entre les femmes et les hommes perdurent, et qu’elles s’accentuent très nettement lorsqu’on prend en compte la parentalité. Une récente étude de l’Insee met en lumière un phénomène inquiétant : plus les femmes ont d’enfants, plus leur accès aux postes à hautes responsabilités et à salaire élevé se trouve compromis.
Ainsi, si les femmes sans enfant ont déjà 30% de chances en moins que leurs homologues masculins d’accéder au top 1% des emplois les mieux rémunérés, cet écart grimpe à 60% pour les mères de famille comparées aux pères. Un véritable « plancher collant » qui maintient les femmes dans les emplois subalternes et peu valorisés, et ce d’autant plus qu’elles ont une famille nombreuse. Les chiffres sont éloquents :
- À temps de travail et qualification égaux, une mère de 2 enfants gagne en moyenne 21% de moins qu’un père
- Cet écart salarial atteint 31% pour les mères de 3 enfants et plus comparées aux pères
- Pour les diplômés bac+3 et plus, la « pénalité » pour les mères monte à 29%, contre 16% pour les non-diplômées
Comment expliquer un tel décrochage des mères sur le plan salarial ? Plusieurs facteurs se combinent pour créer un véritable « plafond de verre » qui bloque l’ascension professionnelle des femmes avec enfants :
Tout d’abord, la répartition inégale du travail domestique et parental conduit de nombreuses mères à réduire leur temps de travail. En 2017, 80% des temps partiels étaient occupés par des femmes. Or les postes à haute responsabilité sont rarement ouverts au temps partiel. Les stéréotypes ont la vie dure : on imagine mal une dirigeante d’entreprise ou une haute fonctionnaire lever le pied pour s’occuper de ses enfants…
S’y ajoute le poids des représentations sociales qui poussent encore trop souvent les femmes vers des métiers moins valorisés et rémunérés. En 2017, seules 17,5% des femmes étaient cadres, contre 22,8% des hommes. Cette « ségrégation professionnelle » n’est pas sans conséquence sur les écarts de salaires.
Mais au-delà, c’est bien souvent le préjugé d’un moindre investissement des mères dans leur travail qui est en cause. Combien de femmes se sont vues refuser une promotion ou une augmentation sous prétexte qu’elles risquaient de faire passer leur famille avant leur carrière ? Les pères, eux, ne sont jamais soupçonnés de manquer d’ambition professionnelle lorsqu’ils deviennent parents.
Heureusement, les lignes bougent. Depuis 40 ans, l’écart salarial femmes-hommes se réduit, passant d’environ 0,3 points par an avant 2000 à 0,4 points depuis le début du millénaire. Mais à ce rythme, il faudra encore des décennies pour atteindre une véritable égalité. L’enjeu est de taille : il ne s’agit pas seulement de justice sociale, mais bien de permettre à notre société et à notre économie de bénéficier pleinement des compétences de TOUS ses talents, qu’ils soient pères ou mères, hommes ou femmes.
Nous appelons les entreprises, les pouvoirs publics et l’ensemble des acteurs sociaux à se mobiliser pour briser ce plafond de verre doublé d’un plancher collant. Cela passe par une action résolue en faveur de l’égalité professionnelle, du partage des tâches parentales, et d’un véritable changement des mentalités pour en finir avec les préjugés sexistes qui assignent encore trop souvent les femmes à un rôle subalterne. Il est temps de construire une société où chacune et chacun puisse réaliser son plein potentiel, quels que soient son genre et sa situation familiale !