13 Juillet 1910 : Naissance de Josefina Niggli, la voix littéraire du « middle ground » culturel

Le 13 juillet 1910 à Monterrey, Mexique, naissait Josephine Niggli, mieux connue sous le nom de Josefina Niggli, une écrivaine qui allait marquer de son empreinte la littérature mexicano-américaine. Romancière, dramaturge, scénariste et professeure, Niggli a été la première et pendant longtemps la seule auteure mexicano-américaine à écrire en anglais sur des thèmes mexicains. Ses œuvres, empreintes d’une vision égalitaire du genre, de la race et de l’ethnicité, ont posé les jalons de ce que deviendrait plus tard le mouvement littéraire chicano.

Une enfance entre deux mondes

Née dans une famille américaine expatriée au Mexique, Josefina Niggli a grandi entre Monterrey et San Antonio, Texas, au gré des soubresauts de la Révolution mexicaine. Cette double appartenance culturelle, source de confusion identitaire durant son adolescence, deviendra le terreau fertile de son écriture. Dès 1928, à seulement 18 ans, elle publie son premier recueil de poésie, « Mexican Silhouettes », témoignage nostalgique de son attachement à Monterrey.

Étudiante brillante à l’Incarnate Word College de San Antonio, Niggli est encouragée par ses professeurs à poursuivre dans la voie de l’écriture. Elle remporte plusieurs prix littéraires, dont celui du Ladies’ Home Journal et le National Catholic College Poetry Award. Mais c’est sa rencontre avec le théâtre qui va révéler sa véritable vocation.

Du folklore mexicain à Broadway

En 1938, Niggli publie « Mexican Folk Plays », une collection de pièces en un acte qui explore l’histoire et les traditions du Mexique, de l’époque précolombienne à la Révolution mexicaine. Préfacé par le dramaturge mexicain Rodolfo Usigli, ce recueil marque le début d’une fructueuse collaboration entre les deux auteurs, unis par leur volonté de porter à la scène la complexité du Mexique moderne.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Niggli est recrutée par NBC International pour écrire des messages en espagnol destinés à l’Amérique latine. Parallèlement, elle s’implique dans la scène théâtrale de San Antonio et rejoint les Carolina Playmakers de l’Université de Caroline du Nord à Chapel Hill, où elle obtient sa maîtrise. Sa pièce « Soldadera », qui met en lumière le rôle des femmes soldats durant la Révolution mexicaine, connaît un franc succès.

Après un bref passage à l’Université nationale autonome du Mexique auprès d’Usigli, Niggli s’installe à Hollywood. Son premier roman, « Mexican Village », est adapté en comédie musicale sous le titre « Sombrero », avec Ricardo Montalbán en tête d’affiche. Elle devient scénariste pour Twentieth-Century Fox et MGM, travaillant dans l’ombre sur des films comme « Seven Brides for Seven Brothers » et « The Mark of Zorro ».

Une œuvre au service de la compréhension interculturelle

Mais c’est dans le roman que Niggli va donner toute la mesure de son talent. « Mexican Village » (1945) et « Step Down, Elder Brother » (1947), écrits en anglais mais imprégnés de culture mexicaine, visent à faire découvrir le Mexique au public américain. À travers le parcours de protagonistes tiraillés entre deux cultures, Niggli explore ce que la féministe chicana Gloria Anzaldúa appellera plus tard la « conscience de la frontière ».

Traductrice de ses propres œuvres en espagnol, Niggli acquiert une solide réputation dans le monde littéraire latino-américain. Des critiques comme Elizabeth Coonrod Martinez la hissent au rang de géants de la littérature mexicaine tels que Mariano Azuela ou Martín Luis Guzmán. Pourtant, aux États-Unis, son nom reste méconnu, éclipsé par le succès des écrivains de la Beat Generation.

Loin de se décourager, Niggli poursuit son œuvre de passeuse entre les cultures. Enseignante engagée à l’Université de Western Carolina, où elle fonde le département de théâtre, elle continue d’écrire pour la radio et la télévision, signant notamment des épisodes de « The Twilight Zone » et « Have Gun—Will Travel ». Son dernier roman, « A Miracle for Mexico », paraît en 1964.

Un héritage retrouvé

À sa mort en 1983, Josefina Niggli laisse derrière elle une œuvre riche et diverse, mais tombée dans l’oubli. Il faudra attendre les années 1990 pour que les chercheurs et les écrivains chicanos redécouvrent cette pionnière et lui rendent hommage. En 2005, l’Université de Western Carolina baptise un théâtre à son nom, le Niggli Studio Theater, un privilège rare pour une auteure mexicano-américaine.

Aujourd’hui, Josefina Niggli est célébrée comme une figure majeure de la littérature de la frontière, celle qui a su, bien avant l’heure, exprimer la complexité de l’identité mexicano-américaine. Son œuvre, ancrée dans le folklore mexicain mais résolument tournée vers l’universel, continue d’inspirer les nouvelles générations d’écrivains.

Alors, en ce 13 juillet, jour anniversaire de sa naissance, saluons la mémoire de Josefina Niggli, cette « reconquistadora » des lettres qui a fait dialoguer les cultures par la magie des mots. Comme elle l’écrivait si joliment : « Il y a une frontière entre le Mexique et les États-Unis, mais il n’y a pas de frontière dans le cœur des gens. » Puisse son message d’humanisme et de fraternité continuer de résonner, par-delà les frontières et le temps.

Chronologie

  • 1910 : Naissance de Josefina Niggli à Monterrey, Mexique
  • 1928 : Publication de son premier recueil de poésie, « Mexican Silhouettes »
  • 1938 : Publication de « Mexican Folk Plays »
  • 1945 : Publication de son premier roman, « Mexican Village »
  • 1947 : Publication de « Step Down, Elder Brother »
  • Années 1950 : Carrière de scénariste à Hollywood
  • 1956-1975 : Professeure d’anglais et de théâtre à l’Université de Western Carolina
  • 1964 : Publication de son dernier roman, « A Miracle for Mexico »
  • 1983 : Décès à Cullowhee, Caroline du Nord
  • 2005 : Inauguration du Niggli Studio Theater à l’Université de Western Carolina