Tisser des liens stratégiques est un must pour grimper les échelons. Mais gare au retour de bâton pour les femmes qui osent approcher les « bonnes personnes » : perçues comme trop dominantes, elles risquent d’y perdre en crédibilité et en influence. Un piège sexiste mis en lumière par une étude américaine inédite. Face à ce constat, les réseaux féminins apparaissent comme un précieux levier pour aider les femmes à se connecter et se soutenir, sans passer pour des arrivistes. Décryptage d’une tendance qui bouleverse les codes du leadership au féminin.
Femmes et réseautage : le double standard qui fâche
Premier enseignement de cette recherche : à compétences égales, une femme qui cherche à élargir son réseau sera jugée plus sévèrement qu’un homme. Un biais sexiste tenace que les chercheuses expliquent ainsi :
- L’empathie et l’esprit d’équipe sont des qualités attendues « par défaut » chez les femmes, donc non valorisées
- Parallèlement, les comportements dominants ou ambitieux restent l’apanage des hommes
- Résultat : une femme qui réseaute avec des personnes influentes s’expose à être vue comme une carriériste sans scrupule
Au final, plus le statut de ses contacts est élevé, plus le sien dégringole aux yeux du groupe ! Un phénomène pénalisant, qui fragilise l’autorité des femmes et les cantonne dans des rôles subalternes.
Les bienfaits des « safe spaces » entre femmes
Face à ce dilemme, la solution pourrait bien résider dans ces communautés professionnelles 100% féminines qui fleurissent dans les entreprises. Une tendance de fond analysée par Nathalie Lapeyre, sociologue spécialiste du genre :
- Ces réseaux jouent un rôle pivot pour promouvoir les carrières féminines, à travers le partage d’expérience, le mentorat ou le mécénat de compétences
- Soutien, sororité, écoute… On y cultive un leadership plus horizontal et bienveillant, loin des rapports de pouvoir traditionnels
- En présentant le réseautage comme un projet collectif au service du groupe, les femmes évitent d’apparaître comme des louves solitaires
Ces « bulles » protectrices servent aussi d’incubateurs pour expérimenter en confiance de nouveaux modes de management. Et accélérer en douceur une révolution culturelle qui bénéficiera à toutes et tous !
L’union fait la force, ou le défi de la masse critique
Autre atout de ces cercles féminins : atteindre plus rapidement le fameux « point de bascule » à partir duquel les minorités peuvent faire bouger les lignes. Pour la chercheuse, tout est une question de nombre :
- Passé un seuil symbolique de 30 à 40% de femmes, les comportements évoluent significativement
- Désormais majoritaires, elles osent s’exprimer, se concerter et revendiquer plus facilement leurs droits
- Une véritable force de frappe pour imposer des changements concrets : parité salariale, moyens dédiés, sanctions anti-sexisme…
En fédérant les énergies autour d’une identité commune, ces réseaux agissent comme un formidable levier de prise de conscience et d’action politique. Une arme redoutable pour faire sauter le « plafond de verre » !
Pour autant, n’en déplaise aux esprits chagrins, il ne s’agit pas de conspirer en catimini contre ces messieurs. L’enjeu n’est pas d’exclure mais de rééquilibrer un système historiquement conçu par et pour les hommes.
En servant de rampe de lancement aux talents féminins, ces communautés inspirent et accélèrent la mise en place de politiques d’égalité plus ambitieuses. Un impératif stratégique à l’heure du manque de main d’œuvre et des défis verts. Au final, en cassant les codes pour se faire entendre, ces femmes solidaires ouvrent la voie à des organisations plus justes et inclusives. Là où chacun, quel que soit son genre, pourra enfin donner sa pleine mesure.
Alors oui, pour bâtir cette mixité heureuse, tous les moyens sont bons. Y compris ces réseaux souvent décriés. Loin d’être des clubs élitistes, ils sont les fers de lance d’un nouveau féminisme décomplexé, qui mise sur l’innovation sociale. La promesse d’un monde du travail où réussite rimerait (enfin) avec sororité !